dimanche 19 décembre 2010

L'île de Niue


NIUE
(du 15 au 22 octobre 2010)

Après avoir visité les Iles de la Société pendant exactement deux mois nous avons quitté Bora Bora, la plus occidentale d'entre elles, pour Niue, petite île qui se trouve sur la route menant aux Tongas.

Nous étions toujours en compagnie de Sundance et Ultréïa, nos compagnons de voyage depuis début juin pour les premiers, mi-juillet pour les seconds ( je ne parle pas bien sûr des voyages précédents effectués avec eux).












Yovo photographié par Ultréïa quitte
Bora Bora...













Nous photographions souvent nos bateaux respectifs au départ des traversées... Voyez -vous Anne de Sundance appareil photos à la main?






Les deux premiers jours nous réussissons à rester en vue les uns des autres. Ensuite c'est beaucoup plus difficile mais nous restons en contact avec la VHF puis avec la BLU.



La traversée de Bora Bora à Niue fait un peu plus de 1100 milles et nous l'avons effectuée en neuf jours à la vitesse très modeste de 5.2 nœuds.




Une traversée de 1100 milles nautiques correspond à environ la moitié de la traversée de l’Atlantique du Cap Vert aux Antilles. C’était en fait la première fois que nous effectuions une traversée de cette importance à deux, sans équipier pour partager les quarts de nuit.
Le premier jour nous avons eu une belle mer et un vent moyen (20 nds au départ puis rapidement 15 nds) qui nous a permis d’avancer à 5.5 nœuds, pas extraordinaire mais correct. Les deux jours suivants la mer était de plus en plus belle, de plus en plus calme et pour cause, le vent est tombé à 10-12 nds puis 8 nds et même 5 nds avant de remonter légèrement et permettre d’atteindre, moteur aidant par moments, une toute petite moyenne de 4.9 nds.
Comme Sundance, nous avions choisi de tirer des bords de grand largue plutôt que d’aller directement vent arrière, allure que nous trouvons inconfortable et peu efficace. Nous avons dons assez sensiblement rallongé la distance.
L’équipage d’Ultreïa a, lui, choisi la route directe pour arriver à Niue avant les deux autres bateaux plus grands, gagnant nettement la régate amicale à laquelle nous nous livrons chaque fois que nous naviguons ensemble : bravo à François et Geneviève !
Finalement, le 6ème jour, nous avons nous aussi opté pour le vent arrière avec voiles en ciseaux et génois tangonné et là, miracle : Yovo allait comme sur des rails sous régulateur d’allure! Nous aurions dû adopter cette allure beaucoup plus tôt !
Le reste de la traversée s’est donc fait vent arrière avec un vent assez faible et une mer parfois inconfortable.
Les distances quotidiennes sont restées plutôt faibles : 114, 126, 111 milles…, la meilleure journée à 137 milles… En tout, 1128 milles nautiques à 5,2 noeuds de moyenne, ce qui est assez peu pour Yovo habitué à faire entre 140 et 175 milles par 24 heures et à tenir une moyenne supérieure à 6 noeuds. Inutile de dire que nous étions contents d’arriver ! Il nous aura fallu deux bons jours pour récupérer de cette traversée assez éprouvante, sous la grisaille et avec des grains. C’était un samedi et un dimanche : parfait car l’île vit aussi au ralenti ces jours-là !


Quelques photos prises pendant la traversée ...














Niue est le plus petit état indépendant au monde. Il est cependant associé à la Nouvelle Zélande sans laquelle il aurait beaucoup de mal à survivre. C’est une île très isolée, seule terre au milieu d’un triangle formé par les îles Tonga, Samoa et Cook, elles-mêmes très éloignées les unes des autres. Elle se situe à 2400 kms au nord-est de la Nouvelle Zélande.
Géologiquement parlant Niue est un grand atoll de corail surélevé, plus ancien que les atolls des Tuamotus par exemple : avec le temps le corail de l’anneau originel s’est étendu vers l’extérieur et surtout vers l’intérieur, remplissant et faisant donc disparaître le lagon central. C’était la première île de ce type que nous rencontrions. Un bon nombre des îles Tongas présentent le même aspect : une île plate faite au départ de corail et recouverte à une certaine époque de grès d’origine sédimentaire, surélevée par rapport au niveau de la mer ( par des mouvements telluriques?) de quelques dizaines de mètres, une soixantaine pour Niue, et une côte entièrement faite de falaises, creusées d’innombrables grottes, crevasses, fjords et galeries terrestres ou sous-marines, qui tombent à pic soit directement dans la mer soit sur un platier corallien à leur pied. Elle est donc très différente des îles polynésiennes typiques aux grandes plages de sable fin bordées de cocotiers. L’île est couverte d’une végétation haute, dense et très verte.


Voici comment l'île nous est apparue le jour de notre arrivée, dans la grisaille ...






et quelques jours après sous un beau ciel bleu...




James Cook qui en 1774 voulut débarquer à Niue et s’y vit refuser l’accès par la population la surnomma « The savage island ». Les niuéens des siècles suivants, vexés, expliquèrent plus tard que Cook avait mal interprété l’accueil de leurs ancêtres !...

La population totale de cet état s’élève à 1300 habitants environ. Ils sont binationaux, niuéens et néozélandais, et parlent le niuéen et l’anglais, un anglais très compréhensible et même souvent de bon aloi, un véritable anglais, pas de l’américain. Les niuéens sont fiers de leurs traditions encore très vivantes. Ils sont croyants et pratiquants et respectent scrupuleusement le repos dominical : rien ne fonctionne ni n’est ouvert le dimanche, ni café, ni restaurant ; le touriste ne trouvera personne pour l’emmener pêcher, faire le tour de l’île, plonger etc… Quant aux navigateurs il leur est conseillé de respecter la population en ne travaillant pas ostensiblement sur leurs bateaux : les vernis à refaire, le sac à voile à recoudre, ce sera pour lundi!


Le seul mouillage de Niue se trouve devant la capitale, Alofi. Il est très beau...













Le quai et sa grue







Une quinzaine de bouées ont été installées pour les bateaux de passage, le fond de corail creusé de multiples cavités étant inutilisable et les profondeurs trop grandes pour ancrer. Comme le mouillage est presque toujours agité par la houle, et donc souvent inconfortable, une grue électrique a été installée pour permettre aux petits bateaux et annexes d’accéder au quai assez élevé et un chariot a été mis à disposition pour les amener jusqu’à de petites places de parking, aucune embarcation ne pouvant être amarrée sans dommage contre la jetée... Un système très bien pensé! La première fois où nous avons accroché notre annexe à la grue a été riche en émotions ! Avec l’expérience nous avons pris de l’assurance.







Alofi s’étire sur quelques kilomètres le long de la côte ouest. La ville s’enorgueillit d’un « shopping centre » qui regroupe autour d’un grand espace recouvert de pelouse, le « square » des anglais j’imagine, un office du tourisme dirigé par des personnes très aimables, la banque du Pacifique Sud, seule banque de l’île et qui ne prend que les cartes Visa et où, à ce propos, l’accueil a été à la limite du correct, la poste, deux cafés dont l’un propose une connection internet, un des deux supermarchés de la ville (tous deux tenus par des chinois), un salon de coiffure et autres boutiques de vêtements et artisanat.



Ici et là des bâtiments administratifs dont ceux du gouvernement et quelques autres établissements ( boulangeries, quincailleries, garages, loueurs de vélos et voitures…), un marché couvert tous les mardis et samedis matins (dès 5h!) et de nombreux petits cafés-restaurants, dont l’un, tenu par deux sympathiques dames, offre une jolie vue sur le mouillage et celui du yacht club d’où, et c’est inhabituel, on ne voit pas la mer. Il y a même un restaurant indien où nous nous sommes régalés avec Anne et Jo d’un curry d’agneau thai. Tout cela très espacé, très propre et fleuri.







Niue est réputée pour sa vannerie et en particulier la confection de chapeaux de paille. Je vous l'accorde, ceux-ci sont plus drôles que beaux! Nous aurions volontiers acheté quelques articles si nous n'avions pas été persuadés que les néozélandais nous les confisqueraient à notre arrivée!




Ce qui nous a tout de suite surpris ce sont les tombes que l’on découvre ça et là, entre deux boutiques, à côté des maisons et même dans les jardins, devant un bosquet, sous des broussailles, seules ou par groupe de deux ou trois, à droite comme à gauche de la route, certaines anciennes et abandonnées, d’autres récentes, décorées de colliers de coquillages et fleuries (les fleurs artificielles sont très à la mode !). En un mot les ancêtres sont très présents et révérés à Niue et des inscriptions élogieuses leur rendent souvent hommage.









Après nous être reposés de la traversée nous avons décidé de visiter l’île et de louer un minibus à huit, les équipages de Sundance, Ultréïa et Yovo plus Pascale et Nicolas de « Badinguet », un Supermaramu 2000, rencontrés pour la première fois à notre arrivée aux Marquises. Nous n’aurions pas pu plus mal choisir quant au temps! Le ciel a été gris et il est tombé un petit crachin toute la journée. En dépit de cela cette île nous est apparue comme un véritable petit bijou ! Les photos prises dans ces conditions ne lui rendent malheureusement pas justice.


Nous sommes d'abord allés voir la Grotte Avaiki, une gigantesque grotte ouverte sur un vaste platier et enserrant plusieurs lacs peu profonds aux eaux cristallines et turquoises. Nous y avons vu nos premiers serpents de mer, des serpents à la morsure qui peut être mortelle mais leur bouche est si petite et leurs crocs placés si loin dans la bouche qu’il faudrait y enfoncer volontairement le doigt pour se faire mordre ! Nous y avons vu une très jolie étoile de mer et de beaux coquillages à la nacre violine. Deux cents mètres plus loin sur le platier une fosse normalement « bleue des Mers du Sud » où il aurait été délicieux de se baigner, le temps s’y étant prêté… Pour accéder à la grotte on traverse une série de galeries dans lesquelles on peut admirer de beaux stalactites et stalagmites polychromes.





















































































Nous nous sommes ensuite arrêtés au Gouffre Matapa. C’est une sorte de canyon entre deux hautes falaises de corail entre lesquelles l’eau de la mer et celle d’une rivière souterraine se retrouvent donnant à l’eau une fraîcheur délicieuse les jours de gros soleil. Seul Jocelyn a eu le courage de s’y baigner! Nous nous sommes contentés de le photographier et d’écouter ses exclamations enthousiastes sur la clarté de l’eau et la beauté de la faune!





Bien qu’ayant marché pendant près d’une heure à leur découverte nous n’avons jamais trouvé les Arches de Talava toutes proches ! Mais la balade dans la fraîcheur d’un joli sous-bois en valait la peine.







Comme nous approchions de midi, que parmi nous se trouvaient quelques bons appétits et que notre pique-nique sous la pluie ne nous tentait vraiment pas, nous avons fait demi tour pour aller au seul petit restaurant de l’île ouvert un dimanche, le Washaway Café dans la jolie baie d’Avatele au sud-ouest de l’île, bien au-delà de la capitale. En chemin nous nous sommes arrêtés au Niue Dive, le seul club de plongée de l’île, où par bonheur François et moi avons pu, bien que ce soit jour férié, pu prendre rendez-vous pour le surlendemain. Nous avons déjeuné de succulents hamburgers arrosés de « Steinlager », la bière locale qui est en fait une bière néozélandaise.






Suite de la balade jusqu’au Gouffre Togo ( prononcer Tong go). Comment le décrire ? C’est un massif de pointes de corail gris bleuté déchiquetées par la mer et le vent, qui domine et descend vers la mer et mène d’un côté à une étonnante oasis, avec ses palmiers et son petit lac d’eau douce, au fond d’une faille que l’on atteint par une échelle vertigineuse et de l’autre à une grotte dans laquelle s’engouffrent les vagues de l’océan. Encore une fois quel dommage que nous n’ayons pas vu des paysages si spectaculaires sous un soleil resplendissant !













































Au bas de la falaise une grotte où les vagues de l'océan s'engouffrent et offrent un spectacle fascinant.








Jo et Nicolas ont décelé là un terrain idéal pour trouver des « uga » (prononcer Ung ga), c’est-à-dire des crabes de cocotiers aux couleurs caractéristiques ( dessus rayé de brun , rouge et bleu, dessous entièrement bleu) et au goût exquis, paraît-il. Nous-mêmes ne nous sommes jamais débrouillés pour en goûter… ! Et effectivement ils ont réussi à en dénicher trois.



Les autres en ont profité pour faire la photo souvenir...




Nous avons été assez frappés par la tristesse, la pauvreté des villages traversés : maisons de bois pour la plupart rudimentaires, à la peinture défraîchie et parfois délabrées, beaucoup d’entre elles d’ailleurs à l’abandon, très peu de commerces, pas de vie. Peut-être aurait-il fallu les voir en semaine … Cela pourrait s’expliquer par le taux important de l’émigration, de l’émigration des jeunes surtout, vers la Nouvelle-Zélande (20 000 Niuéens) et l’Australie ( 3 000).
Il faut reconnaître cependant que les jardins étaient très bien entretenus, les pelouses communales et les bords de la route bien tondus. La route goudronnée qui fait le tour de l’île, 123km, et les routes traversières en terre battue sont aussi en excellent état.






















Vu au bord de la route...! Impressionnant!


Dernier arrêt et dernières photos de la journée ...



Nos quatre hommes en train de diagnostiquer l'origine du bruit qui nous a contraints de nous arrêter.

Et à notre retour au mouillage...


Le lendemain apéro sur "Badinguet" pour reparler de la balade et échanger des photos...



Deux jours après cette balade François et moi avons fait une plongée double avec Kate du centre Niue Dive. Nous sommes d’abord allés sur une zone corallienne très belle où nous avons vu entre autres espèces des Ptéroïs radiata que nous n’avions pas vus depuis la Réunion ( mais j'en ai raté la photo!) , des poissons clowns et, rencontre rare, une murène ruban jaune vif et bleu lumineux ( on n’en voyait que la petite gueule grande ouverte mais on savait que dans le trou se dissimulait un corps de près d’un mètre !).



Ensuite nous avons rejoint son mari qui avait trouvé un groupe de dauphins peu farouches et dont nous avons pu suivre les évolutions la tête sous l’eau entraînés par le bateau.
Et la séance s’est terminée par un plongée dans une grotte sous-marine où nichaient, chacune dans son trou une quinzaine de langoustes de belle taille… Là encore un spectacle dont on ne se fatigue pas !



Au sortir de la grotte ce joli banc de poissons...




Quelques autres jolis poissons, coraux ou autres bénitiers...







Avant de rentrer nous sommes allés au « Snake Gully », la fosse aux serpents, ces fameux serpents vus à la Grotte Avaiki. Il y en avait effectivement plus qu’ailleurs : certains se reposaient au fond entortillés les uns autour des autres, d’autres venaient vous frôler en montant respirer à la surface ou en en redescendant. Brrr !...Mais on finit par s’habituer ! Sept ou huit suivaient François en particulier : nous avons appris par la suite qu’ils adoraient la couleur bleue, couleur de sa combinaison de plongée et de ses palmes!











Le week-end suivant notre arrivée les Niuéens célèbraient la fête nationale, fête de l’indépendance. Peu de manifestations au niveau de la population en dehors de courses de va’as ( pirogues), une caricature de celles que nous avons vues aux Marquises ou dans les Iles de la Société : l’un des participants sifflotait en poussant doucement sur sa pagaie ! Pas très sérieux !


En revanche la course de radeaux était des plus désopilantes. Et eux y mettaient du cœur !







Enfin, ce que nous avions espéré toute la semaine de notre séjour à Niue, est arrivé une heure avant notre départ pour les Tongas : une baleine à bosse et son baleineau sont venus nager tout près des bateaux. Le petit faisait exactement comme sa mère. Ils ont commencé par se lancer entièrement hors de l’eau puis à s’éclabousser en battant violemment la surface de leur queue. Ensuite ils sont venus droit sur le babord de Yovo avant de décider de passer derrière. Ils se déplaçaient très tranquillement et nous avons pu les photographier longtemps et sous plusieurs angles. On a du mal à imaginer la taille de ces animaux : la mère devait bien faire 12 à 15 mètres de long et 3 à 4 mètres de large ! . Inoubliable ! Nous espérons que cette rencontre se reproduira…







Une heure après donc nous partions pour les îles Tongas qui seront l'objet de notre prochain article.








Yovo et son capitaine en route vers les Tongas vous disent "A bientôt!"

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