vendredi 15 mai 2020

CURACAO

CURAÇAO
( 2èmes semestres 2018 et 2019)


Fin octobre 2016, après avoir passé l’été en France nous sommes retournés sur le bateau qui était à l’époque à la marina de Coral Cove sur l’île de Trinidad. L’année 2017 nous avons navigué le long de l’arc antillais, seuls ou avec une amie de Roanne ou encore avec Paul, Adeline et leurs deux petites filles. Avec eux nous avons fait Grenade-Martinique pour la première et Martinique-Grenade pour les seconds. Puis nous avons continué à avancer vers le nord-est et avons fait des étapes plus ou moins longues en Dominique, Guadeloupe, Antigua, Saint-Martin, les Îles Vierges Britanniques, les Îles Vierges Americaines, les Îles Vierges Espagnoles et Porto-Rico. Je dois encore faire les articles sur toutes ces îles dont nous avions déjà visité un grand nombre. De Porto-Rico nous avons tiré quasiment plein sud sur l’île de Curaçao, où nous voulions laisser le bateau car elle se trouve hors zone cyclonique et possède une marina correcte.






De fait nous avons laissé le bateau à Curaçao deux fois, la première le deuxième semestre 2017 et la seconde le deuxième semestre 2018. 
Curaçao est un état autonome au sein du royaume des Pays-Bas depuis la dissolution de la Fédération des Antilles Néerlandaises le 10 octobre 2010 qui regroupait à l’époque 5 îles, toutes liées aux Pays-Bas par leur histoire, Curaçao, Bonaire, Saba, Saint-Eustache et la partie hollandaise de Saint-Martin. Aruba avait déjà quitté cette fédération en 1986. Willemstadt, la capitale de Curaçao, en était la capitale. 

Curaçao se situe à 70kms au large du Vénézuela entre Bonaire et Aruba avec qui elle forme un groupe d’îles souvent appelées les ABC ( Aruba-Bonaire-Curaçao). Curaçao est petite, 60 kms sur 11 de large, et compte 158 040 habitants (2015). 



Quelques mots sur la marina tout d’abord, principalement pour nos amis navigateurs…
La marina se trouve à l’intérieur des terres. On l’atteint en faisant ouvrir le pont flottant de la reine Emma et en suivant un chenal qui passe sous un autre pont, le pont Juliana. La marina ne se trouve pas très loin d’une raffinerie de pétrole brut vénézuelien qui pollue l’atmosphère et rend malade une partie de la population. Fort heureusement le vent qui souffle toujours, et toujours dans la même direction, éloigne les fumées de la zone où se trouve la marina. Cette usine, vendue à l’île pour une bouchée de pain par les Vénézueliens, était en fait un cadeau empoisonné!  








La marina est assez chère (400€ par mois pour notre monocoque de 41 pieds). 
Comme elle est la seule dans la zone, ils peuvent appliquer les tarifs qu’ils veulent!  
Elle est assez bien gérée et équipée. Le directeur est sympathique et assez réactif. Les artisans qui travaillent à la marina ou avec la marina sont plus ou moins bons. Nous avons personnellement eu des déboires avec l’électricien qu’ils ont fait venir, un gars du nom de Rajinder si nous souvenons bien : il nous a fait payer à prix d’or des heures qu’il n’a pas toutes faites, et impossible de ne pas obtempérer car tout se fait au travers de la marina qui donne le quitus pour partir et surtout obtenir l’ouverture du pont flottant. Il n’y a pas non plus sur place de bon frigoriste. Le menuisier n’est pas donné mais il est très bien de même que le gréeur. 

janvier 2018 ; remise à l'eau...





juin 2018 : sortie de l'eau...





Comme c’est souvent le cas cette marina est assez loin du centre ville mais on peut cependant y aller à pied en une demie-heure. Un peu dur quand il fait chaud car il y a du dénivelé… On peut donc quand même aller en ville où se trouvent les cafés, les restaurants, les musées, les boutiques, etc…
Le grand supermarché du coin, Vreugdenhill, très bien achalandé. Ils envoient tous les matins un minibus qui vous emmène au supermarché et vous reprend une heure plus tard pour vous ramener à la marina. Le chauffeur est charmant et accepte de s’arrêter à la laverie en chemin. Très pratique! De plus les deux accastilleurs sont à deux pas de Vreugdenhill : que rêver de mieux?
La marina loue aussi, pas très cher, une petite voiture si l’on veut aller visiter l’île, faire les formalités sans trop marcher ou partir à la recherche d’une pièce pour le bateau, faire réparer quelque chose, etc… On trouve pas mal de choses à Curaçao.
Tous les vendredi soirs il y a un apéro offert par la marina sous l’apatam. Chacun amène de quoi grignoter, certains amènent de quoi faire un barbecue. C’est très sympathique.
A la marina nous avons rencontré de nombreux navigateurs avec qui nous nous sommes lié d’amitié, liens d’autant plus forts avec ceux que nous avons revus lors du deuxième séjour, Jill et Rodney de LOOKFAR, Monique et Marc de BALOO et Pamela de Dr. FLUE par exemple, et nous nous en sommes fait de nouveaux, Sharon et Bill de CASA BLANCA, Clare et Andy de TINTAMARRE, Eileen de GUIZZI, Monika et Herbert sur MON JUAN, Georges sur MELANIE et un jeune français Michaël sur AZIADE. Nous sommes en pleine période de Covid-19 et certains d'entre eux sont coincés dans divers endroit du monde, qui aux San Blas, qui à Roatan ( îles de la Baie, Honduras), qui à Bonaire, qui aux Galapagos... à attendre la possibilité de repartir et continuer ou de mettre le bateau en sécurité dans une zone hors cyclone avant qu'il ne soit trop tard... Un vrai problème!


Dîner à bord de YOVO en juin 2018 avec Sharon et Bill et Jill et Rodney, deux couples d'américains...





Bien sûr beaucoup de hollandais viennent visiter Curaçao. C’est un peu comme la Martinique ou la Guadeloupe pour nous. Je l’ai déjà dit, bien que Curaçao ne soit pas une belle île elle ne manque pas d’intérêt. 
C’est d’abord son architecture très particulière qui tout de suite a retenu notre attention, ces maisons aux frontons typiques des villes hollandaises, mais ici - et c’est ce qui fait leur charme - de couleur pastel, jaune, rose, vert, bleu…,  comme celles que l’on voit en arrivant en voilier de part et d’autre du chenal d’entrée juste après le pont flottant Reine Emma. 





On raconte que, vers 1800, un des gouverneurs de Curaçao, un monsieur Albert Kikkert, aurait obligé les habitants de l’île à repeindre leurs maisons avec des couleurs autres que le blanc car la réflexion du soleil sur les façades blanches exacerbait les terribles migraines dont il souffrait. Un peu partout en ville, que ce soit dans le vieux quartier d’Otrabanda ou dans les quartiers plus récents, toutes les maisons sont colorées. Le résultat est très joli et unique et Curaçao est de ce fait une ville appartenant au patrimoine mondial de l’humanité, ce d’autant plus que bon nombre des ces maisons remontent au XVIème siècle. 













Il existe deux ponts remarquables à Willemstad, le pont Reine Emma et le pont Juliana, je viens de les citer. Le premier est un pont flottant pivotant. Il relie deux quartiers importants de la ville, Otrabanda et Punta. Il est large et uniquement ouvert à la circulation des piétons. Quand un bateau veut passer, que ce soit un voilier ou un cargo, il doit demander l’ouverture du pont. Les voiliers doivent le plus souvent attendre une bonne demie-heure en faisant des cercles dans le chenal, fastidieux quand on vient de la marina, pas facile quand on vient de l’extérieur et que la mer est forte. Pour les cargos, peu manoeuvrants, c’est beaucoup plus rapide! Ce pont flottant est une des attractions de l’île et les touristes sont toujours nombreux à regarder la manoeuvre.







Le deuxième, le pont Juliana, relie les deux mêmes quartiers en enjambant de ses quatre voies le chenal d’entrée. Il est impressionnant de par sa hauteur ( 57 m) et le vaste arc de 500 mètres qu’il forme au dessus de la baie. Il a été construit en 1974 pour soulager le pont Emma quand la circulation automobile est devenue trop importante pour ce dernier. Il est suffisamment haut pour que les gros cargos et les pétroliers passent dessous. Un spectacle impressionnant!





Il y a plusieurs lieux intéressants à visiter en ville : d’abord la synagogue Mikvé Israel-Emanuel qui date du XVIIème siècle. La congrégation elle-même, fondée par des juifs espagnols et portugais des Pays-bas et du Brésil remonte au milieu du XVème siècle. Ce serait la plus ancienne synagogue des Amériques à être toujours en activité. Chose étrange pour les non-juifs et comme dans celle de Saint-Thomas aux Îles Vierges Américaines, son sol est recouvert de sable rappelant aux membres de la congrégation « la façon dont leurs ancêtres Juifs de la péninsule Ibérique couvraient le sol des maisons de prière afin d'étouffer le bruit de leur activité cachée et de ne pas se faire dénoncer ». Dans l’enceinte de la synagogue il y a un intéressant petit musée juif. 







Il y a plusieurs musées à Willemstad :
le musée du Fort Rif à l’entrée du port qui est fagocité par un centre commercial, 
le musée maritime qui retrace par des cartes, des objets d’époque, des panneaux explicatifs 500 ans de l’histoire maritime de cette île dont se sont emparées différentes nations européennes attirées par son intérêt économique et stratégique. Il rappelle qu’à l’époque de la piraterie l’île était un repaire de boucaniers.

Le musée Kura Hulanda, construit sur un ancien marché aux esclaves de la ville, présente des collections très diverses rassemblées  sur l’origine de l’homme, sur les empires d’Afrique de l’Ouest, sur l’or précolombien, sur les reliques mésopotamiennes, sur l’art antillais , mais plus particulièrement sur le Passage du Milieu, la traite des esclaves et l’histoire de l’esclavage aux Antilles. Au début de la traite les habitants de Curaçao ont eux-mêmes été envoyés comme esclaves à Hispaniola (l’île que se partagent Haïti et la République Dominicaine).













Nous avons plusieurs fois loué la voiture de la marina pour visiter l’île, seuls ou avec des amis, entre autres avec Jill et Rodney, nos amis américains de LOOKFAR.





L’île est petite, on en fait le tour rapidement. Lors de nos deux séjours nous avons suivi sa côte au vent battue par la houle et le vent ...









... puis sa côte sous le vent donc protégée où se trouvent  les villes principales, de belles plages et criques et les massifs coralliens. 







L’île est recouverte d’une savane semi-aride parsemée de cactus et d’arbustes épineux. Il y a de nombreux lacs salés habités par des flamants roses plus ou moins nombreux selon les saisons et les années. Il y en avait peu les deux fois où nous avons circulé dans l’île.










On voit à Curaçao la plupart des espèces d’animaux typiques des îles de la Caraïbe : des iguanes, des lézards multicolores, des pélicans, des sucriers, des colibris bien difficiles à photographier, des oiseaux souvent très colorés comme les orioles troupiales… 









Lors de ces sorties  nous avons vu d’anciennes maisons de blancs riches, de blancs pauvres (ou d’esclaves affranchis?). Les maisons des colons étaient très semblables aux maisons coloniales vues dans d’autres pays. Ce sont les maisons des pauvres blancs ou des esclaves affranchis qui étaient les plus intéressantes car nous n’avions rien vu de pareil, des maisons aux murs épais, plus larges en bas qu’en haut avec de très petites ouvertures…







Nous n’étions pas venus à Curaçao pour faire du tourisme mais pour y mettre notre YOVO à l’abri pendant la période cyclonique car Curaçao est très au sud de la route habituelle des cyclones. La sortie de l’eau et la remise à l’eau avec un chariot hydraulique a été pour nous une première. Un peu inquiets la première fois, nous avons été rassurés par la taille de l’engin et la compétence du manipulateur ( mieux vaut ne pas parler de son caractère désagréable!).






Le 31 janvier 2019 à 7 heures du matin nous avons définitivement quitté la marina et Curaçao.
Nous étions accompagnés de Michaël, un jeune français hors du commun. Après une enfance et une adolescence très difficiles, il a, un jour, décidé de s’acheter un voilier et de partir naviguer. Il n’avait aucune notion pratique de voile mais une connaissance livresque assez étonnante. Quand nous l’avons rencontré il venait de s’acheter un vieil OVNI et commençait à le remettre en état. Cela lui a pris pas mal de temps, d’autant plus qu’il ne roule pas sur l’or, mais surtout ce qui l’a longtemps retenu à Curaçao, plus que ne lui permettait son visa, cela a été d’oser se lancer, d’oser partir affronter l’océan. Il l’a fait fin 2019 après plus d’un an à Curaçao et se trouve aujourd’hui, 22 mai 2020, en Martinique où il cherche du travail, sans trop de réussite apparemment. Il est cordiste de métier. Cordiste, c’est celui qui monte sur les falaises pour faire tomber les rochers, fixer des filets, des cables etc… Mais il est intelligent, travailleur, débrouillard et adroit de ses mains et nous ne doutons pas qu’il s’en sorte d’autant plus qu’il mène une vie très simple, quasi ascétique. La covid-19 n’aura pas facilité sa recherche d’emploi… Il a un chien extraordinaire, un border collie très intelligent, Prune, qui amenait à vos pieds un bâton pour qu’on joue avec elle. 







Lui est resté à Curaçao et est allé dans la baie quasi fermée de Spanish Waters et nous, nous avons continué jusqu'à Klein Curaçao, une toute petite île entre Curaçao et Bonaire où nous avons fait une escale d’un après-midi et une nuit. Nous voulions ensuite aller à Bonaire, île très sympathique, attendre une bonne fenêtre météo pour aller en République Dominicaine, qui se trouve quasiment pile au nord.

Prochain article : le début de la saison 2019 où, après quelques semaines à Bonaire, nous sommes allés en République Dominicaine, aux Bahamas et sur la côte est des Etats-Unis.











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