lundi 22 juin 2015

DE MADAGASCAR AU CAP

Du 10 novembre 2014 au 7 mars 2015

Pour nous la descente du canal du Mozambique a commencé le 10 novembre 2014 quand nous avons quitté la côte de Madagascar depuis Boina Bay, un peu avant le cap Saint André, le cap malgache le plus avancé vers l’ouest. Elle s'est faite par étapes.



DE MADAGASCAR A BARAZUTTO ( 751 milles / 5 jours 1/2)

La mer a été très belle les trois premiers jours, belle les deux suivants, plus agitée le dernier jour. Nous avons eu peu, voire très peu, de vent et avons dû avoir assez souvent recours au moteur. 



Nous avons aussi eu pas mal de vent de face mais cette première partie de la traversée s’est bien passée avec l’aide d’un courant favorable et nous avons atteint l’île ou plutôt l’archipel de Barazutto (Mozambique) après six jours de navigation. 



Nous y sommes arrivés en pleine nuit mais BADINGUET et ALIBI arrivés avant nous et de jour nous ont donné leurs waypoints pour les rejoindre malgré la nuit noire. Merci les copains!
Le lendemain, nous sommes allés mouiller plus au sud en face d’un hôtel luxueux, l'Anantara, où nous avons pu avoir accès à internet et également prendre un très bon et copieux déjeuner.



C’était notre première escale sur le continent africain.

Nous avons fait une balade très intéressante dans les dunes situées derrière l’hôtel, guidés par un jeune étudiant originaire du village voisin, un village de pêcheurs très pauvre, à l’opposé du luxe de l’hôtel tout proche. 









Récolte du vin de palme
Récolte du vin de palme

Ces dunes très escarpées entourent un lac où l’on peut voir des crocodiles, aux dires de notre guide. Nous les avons longtemps cherchés pour finalement en entrevoir un qui s’est immédiatement jeté à l’eau… Il y avait également beaucoup d’oiseaux dans cet endroit magnifique.










Sur le chemin du retour vers le village quelques rencontres bien sympathiques, des petites filles très souriantes et malicieuses....





Retour sur les bateaux ...






Nous avons eu aussi une matinée de pluie et nous sommes rentrés trempés sur le bateau.



Nous étions tout au sud de l’île de Barazutto et il y a là un passage permettant de rejoindre la pleine mer. Hélas, on nous avait dit que nos bateaux quillards ne pourraient pas l’emprunter par manque de profondeur. Pourtant, il nous semblait que les cartes marines indiquaient une profondeur suffisante, ce que le club de plongée de l’hôtel nous confirmait. Tôt le matin, Jean-Pierre d’ALIBI et François sont allés en annexe sonder le passage: il y avait assez d’eau. Un gros yacht à moteur empruntait le passage à ce moment-là, ce qui les a aidés à voir le chemin à suivre. L’après-midi, nous avons pu traverser à petite vitesse jusqu’à San Antonio, l’île située tout au sud et, le lendemain, rejoindre la pleine mer. En fait c’est ce dernier tronçon qui s’est avéré le moins profond, mais nous avons pu sortir sans dommages. Là où sont passés ALIBI et BADINGUET, un peu plus au nord que nous, c’est passé à une vingtaine de cms près!  Ils se sont fait un peu peur… Une passe qui fait gagner une quarantaine de milles mais à prendre donc avec beaucoup de circonspection!



La passe que nous avons empruntée le lendemain matin
Nous avons passé la nuit devant San Antonio






DE BARAZUTTO A RICHARD’S BAY ( 507 milles / 3 jours)

Le trajet entre Bazarutto et Richard’s Bay, le premier port d’entrée en Afrique du Sud, s’est fait en trois jours avec l’aide du fameux Courant des Aiguilles, tant redouté par les navigateurs. Nous avons eu un peu de mal à le trouver au début mais Nicolas de BADINGUET avait un logiciel qui nous a finalement permis de le dénicher. Ce courant nous a été précieux, nous permettant une bonne moyenne de 6,8 noeuds. 
Nous étions très contents d’arriver en Afrique du Sud. Les formalités ont été assez faciles, les autorités venant à la marina de TUTI GAZI. Une marina sympathique, mais dont les pontons sont en très mauvais état à tel point qu’ils se décrochent et qu’il faut les renforcer avec des chaînes et des cordages!… De plus, la marina est  loin du centre ville et il faut prendre un taxi pour se rendre au supermarché local. Mais l’escale nous a permis de louer une grande voiture pour aller tous les six visiter le parc animalier de HLUHLUWE-IMFOLOZI (on prononce « tchoutchouwé »…) tout proche. 

DE RICHARD’S BAY A DURBAN (92 milles / 14 heures)

Le 1er décembre 2014, quelques jours après notre retour de la réserve, nous sommes partis de Richard’s Bay pour parcourir les 92 milles qui nous séparaient de Durban et de sa marina en état sinon parfait du moins meilleur! Nous y étions d’ailleurs allés en voiture la semaine d’avant pour nous en rendre compte par nous mêmes : nous avions en effet l’intention d’y laisser nos bateaux deux mois pour pouvoir rentrer en France passer les fêtes en famille et voulions avoir l’esprit tranquille à ce sujet. 
Bien que la mer ait été agitée au départ et forte par moments la traversée s’est bien passée et a été rapide, 14 heures à peine.





Le temps pour nous de nous repérer dans la ville, de préparer le bateau pour cet hivernage et pourALIBI de prendre aussi contact avec un mécanicien ( Jean-Pierre et Armelle avaient pris la décision de changer leur moteur pour un neuf) et nous prenions tous les quatre l’avion le 10 décembre 2014 pour Paris.

DE DURBAN A EAST LONDON ( 250 milles  / 33 heures)

Nous étions de retour à Durban le mercredi 11 février après un séjour de deux mois en France. 
En arrivant à Durban, pas de chance, François a eu une sorte de grosse crève qui l’ a rendu incapable de faire quoi que ce soit pendant trois jours si bien qu’il n’a eu que deux jours pour préparer le bateau pour la fenêtre météo qui s’annonçait. Une fenêtre très brève, deux jours, mais suffisante. Une chose nous faisait beaucoup hésiter, des vents de 30 à 35 noeuds avec ce fameux courant des aiguilles
Le 17 février ALIBI et YOVO, qui au départ voulaient partir au petit matin, ont finalement décidé de reporter à la fenêtre suivante. Dans la matinée, sur les conseils du responsable de la marina, ils ont parlé de la décision à prendre à Rob Bowman, le patron du chantier de marine du coin, un marin expérimenté qui connait parfaitement les conditions de navigation locales. Il nous a rassurés et nous a fortement incités à partir. A onze heures nous étions prêts et François a alors découvert que le pilote électrique ne fonctionnait pas! Il ne l’avait pas vérifié et un examen attentif a montré qu’il était bel et bien en panne. Vite François a installé notre régulateur d’allure Windpilot ( pilote automatique qui fonctionne avec le vent)  qui, encore une fois, nous a bien rendu service et à midi moins vingt le mardi 17 février nous quittions la marina de Durban. 
Le  premier jour s’est particulièrement bien passé : du soleil, le Courant des Aiguilles trouvé au bout de 35 milles, un peu de vent de face mais pas trop et une mer calme qui nous a permis d’utiliser le Windpilot. Idem pendant la nuit. Ceci dit nous avons dû quand même utiliser le moteur car il fallait absolument avoir une vitesse d’au moins sept noeuds pour arriver à East London avant le coup de vent suivant : avec le Windpilot nous perdons pas mal de vitesse car il ne faut pas trop toiler le bateau et il nous fait faire beaucoup de zigzags.
Le lendemain les choses ont changé. Le vent qui était arrière depuis la nuit a régulièrement forci pour effectivement atteindre les 30 noeuds annoncés et même plus en rafales ! Ce vent a soulevé une mer très forte avec des creux impressionnants de quatre mètres ( peut-être cinq, difficile à dire) mais YOVO à son habitude passait bien. Quant au Courant  des Aiguilles, de deux noeuds le mardi il est passé le lendemain à trois puis quatre et cinq noeuds si bien que nous avancions tout le temps avec entre 9 et 11 noeuds avec des pointes à plus de 12!   Là notre Windpilot  ne pouvait plus faire face et il a fallu barrer. Enfin… François a barré car les vagues étaient si fortes que je ne tenais pas longtemps! Ce n’était pas l’excès de voile qui pouvait gêner le Windpilote : nous avions laissé juste un tout petit bout de génois. Plus besoin de moteur non plus bien sûr! Nous avons fait la distance en 33 heures soit une moyenne de 8.12 noeuds, notre record! Avec notre pilote électrique nous aurions sûrement fait mieux encore!
Ce Courant des Aiguilles fait peur à beaucoup de gens mais honnêtement nous avons connu des mers bien pires dans les traversées trans-océaniques. 
Nous sommes arrivés dans le port fluvial de East London vers 21 heures, après un jour et demi de navigation costaud,  et avons mouillé près de la marina et le matin nous avons pris un corps-mort bahamien (avant et arrière ) dans l’axe de la rivière. 
Inutile de préciser que François était bien content d’arriver!

Le lendemain un jeune navigateur autrichien, Christophe, sur TAURUS, rencontré à Durban et arrivé à East London le même jour que nous, a réparé de main de maître notre pilote électrique : c’était une question de soudure très méticuleuse à faire sur le cable de connexion. Ainsi réparé il a très bien marché jusqu’à ce que nous achetions un cable neuf à Cape Town mais nous  gardons l’ancien précieusement en réserve.

Nous sommes restés un peu plus de trois jours à East London. La situation est jolie, dans un estuaire un peu encaissé aux rives couvertes de végétation, tout près d’un grand pont sous lequel nos bateaux ne peuvent passer. 





Le pont au delà duquel les voiliers ne peuvent aller
Végétation aux abords de la rivière

Les autorités sont là, très cools, un agréable changement; il y a un petit restaurant mais c’est tout. On s’est reposés et on a fait quelques pas dans le coin. Comme les commerces sont loin on a fait des courses en taxi avec une dame charmante qui nous a parlé de la situation dans le pays. C’est aussi là qu’on a fêté mon  66ème anniversaire au restaurant du coin, pas terrible! C’était plus compliqué mais on aurait sans doute  mieux fait d’aller en ville… On a quand même passé un bon moment!





DE EAST LONDON A SIMON’S TOWN

Le dimanche 22 février départ pour Simon’s Town avec une belle fenêtre météo. 
Nous avions deux raisons de nous y arrêter. D’abord tout le monde nous l’avait recommandé comme étant un endroit sympa et très joli et c’est vrai! Ensuite nous y avions des connaissances qui sont depuis devenus des amis, Verena et Tobby, des suisses que nous avions rencontrés pour la première fois aux îles Tonga.
Nous avons mis trois jours pour rejoindre ce petit port au fond de False Bay, trois jours d’une navigation sans problème avec une belle mer et des vents de 12 à 20 noeuds selon les moments, donc parfaits. Seul regret : avoir passé le Cap des Aiguilles de nuit. Après y être allés en voiture nous nous sommes dit que de toutes façons nous n’aurions rien vu, c’est tout plat!

TAURUS devant la côte entre East London et Simon's ton








Nous avons retrouvé les Fous de Bassan et aussi des albatros mais nous n'avons pas réussi à photographier ces derniers.






Même chose pour les phoques qui s'aventurent très loin en mer pour se nourrir. Quand j'ai vu le premier j'ai cru qu'il était mort et que son ventre était tout gonflé par la putréfaction : en fait il se dorait tout simplement au soleil en agitant paresseusement une nageoire!



Si la traversée a été tranquille, l’arrivée en revanche a été costaud avec des vents passant à 30 et 35 noeuds en arrivant dans la baie et à 40 par rafales à l’approche du port!



Le Cap de Bonne Espérance vu depuis l'entrée dans False Bay
Au fond à gauche la ville de Simon's Town

Les ALIBI, arrivés de jour, n’avaient pas voulu  prendre le corps-mort à l’extérieur de la marina que celle-ci leur avait réservé car il semblait trop léger et ils avaient décidé de mouiller à proximité. Avec les rafales ils ont tout de suite dérapé et ont failli heurter les bateaux avoisinants. Gros stress à bord d'autant plus que le guideau refusait de fonctionner! Il n’était que 17h : les gens de la marina encore sur place ont vu qu’ils avaient des problèmes et ont envoyé quelqu’un leur dire de venir à la marina, qu’ils allaient leur donner une place. Idem pour nous. Pourquoi ne nous l’ont-ils pas tout de suite proposé quand nous leur avons écrit pour leur demander une place? Pourquoi devoir transiter par les corps-morts? Donc pour nous, arrivés quelques heures plus tard et prévenus, tout a été très facile : Jean-Pierre et Armelle étaient là pour nous indiquer la place et prendre les amarres!

Une multitude de cormorans vivent aux abords de la marina.






Le lendemain Verena et Tobby sont venus sur le bateau et nous nous sommes revus plusieurs fois soit à la marina soit chez eux et après au Cap. De leur maison ils ont une vue magnifique sur la baie et le cap de Bonne Espérance.









Nous sommes restés dix jours dans cette jolie ville. De là nous sommes allés au Cap. C’est aussi pendant cette période que nous avons loué une voiture pour faire une première virée de quelques jours dans la région.

Le 7 mars, belle fenêtre météo, nouveau départ pour la dernière étape : Simon’s Town - le Cap. Une traversée rapide, une dizaine d’heures, et sans souci. De fait nous aurions dû la faire encore plus rapidement : nous ne comprenions pas pourquoi nous n’avançions pas. Nous avons mis cela sur le dos d’un courant contraire, pourtant les instruments ne l’indiquaient pas. Nous avons pensé à un problème de moteur… jusqu’à ce que François aille à l’avant et se rende compte qu’il avait oublié d’amarrer l’ancre qui était passée par dessus bord sur un mètre  au moins et ramassait toutes les algues qui se présentaient devant l’étrave et Dieu sait s’il y en a dans le coin, de ces grosses algues épaisses, longues d’un mètre ou deux et larges d’une trentaine de cms, le kelp. Il y en avait un bonne centaine de kilos accrochées à l’ancre depuis des milles! François a d’ailleurs eu bien du mal à les en dégager! 
Comme pour le Cap des Aiguilles, gros regret : on nous avait tant dit qu’en arrivant dans la Baie de la Table  nous allions avoir des vents de 40 noeuds, même dans la marina ( les  CHARLENE et les ALIBI ont d’ailleurs abimé leur bateau et/ou d’autres bateaux en venant à leur place dans la marina!)  et que, tôt le matin, en général, c’était calme, nous avons décidé de faire la traversée de nuit pour arriver au petit jour. Cela voulait dire que nous ne verrions pas le Cap de Bonne Espérance de jour!  Regret d’autant plus amer que nous avons quand même eu les 40 noeuds de vent en arrivant et que nous avons attendu à la bouée de sécurité que le vent se calme un peu! Cela n’a pas été facile mais nous n’avons rien abîmé, les gars de la marina et les copains étaient là pour nous aider.

La vue de la Montagne de la Table depuis la mer est extraordinaire!









Pendant tout notre séjour un jeune phoque vivait près de Yovo. Il était blessé, s'était emberlificoté dans du fil de pêche qui lui entaillait la peau. A plusieurs reprises des gens de la Société Protectrice des Animaux sont venus le lui enlever . Deux jours après il revenait de nouveau entouré de fil de pêche. il était bien connu des gens de la marina qui lui avait donné le nom de Henry.



Enfin ça y était, nous étions au Cap! La plus dure traversée d’un tour du monde était terminée et nous étions contents de l’avoir faite!

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