mercredi 29 juillet 2015

LA TRAVERSEE DE L'ATLANTIQUE SUD OU LES ILES DE SAINTE-HELENE ET D' ASCENSION

Du 30 avril au 1er juin  2015

Pour rejoindre le Brésil depuis la Namibie nous avions décidé de nous arrêter à Sainte-Hélène puis à Ascension, deux îles appartenant au Royaume-uni, d'une part parce que nous avions envie de les visiter, d'autre part parce qu'elles nous permettaient de tronçonner la traversée de l'Atlantique Sud.




SAINTE-HELENE

Dix-sept jours après être arrivés à Walvis Bay ( Namibie) nous quittions ce beau pays ( dont j'écrirai l'article un peu plus tard) pour Sainte-Hélène distante de 1230 milles/ 2200 kms. 
La veille, le 29 avril, nous avions appris le décès de Mario (Samper), un ami de Tunisie que nous aimions beaucoup et dont nous apprécions tout particulièrement la gentillesse, la bonne humeur, la chaleur, la droiture… Lui et Roberte étaient un couple très uni et nous avons beaucoup pensé à eux pendant toute cette traversée.
Huit jours à peine et nous étions à Jamestown : nous avons eu un bon vent, une belle mer, surtout les cinq premiers jours. Les trois derniers le vent s’est affaibli et nous avons décidé d’appuyer au moteur pour arriver au mouillage avant la nuit.
Pour une fois nous étions une quinzaine de milles devant ALIBI, l’orientation du vent ne leur étant pas favorable à l’inverse de nous. 
Vers 12h30 le vendredi 8 mai nous avions Sainte-Hélène en vue, vers 16h nous longions les hautes falaises de lave brune du sud-est puis de l’est et à 17h nous étions au mouillage. 









Nous avons dû prendre la seule bouée jaune dont l’anneau n’était pas muni d’un bout! : cela a été la croix et la bannière pour parvenir à enfiler notre amarre dans l’anneau au ras de l’eau! 

Pour les navigateurs : les corps-morts sont en très bon état et très costauds ; les bouées rouges sont pour les bateaux au plus fort tonnage que le nôtre ( 20 tonnes et plus). Le "port control" opère 24h sur 24, vous donne les coordonnées du mouillage et vous indique quel type de bouée prendre. Obligation de prendre un de ces corps-morts donc, obligation aussi d’appeler le « ferry service » pour se rendre à terre. Ce sont des services payants mais ce n’est pas plus mal car il aurait été très difficile d’amarrer nos dinghies et d’aller à terre par nos propres moyens.

Sainte-Hélène est une île vraiment à part : c’est la terre au monde la plus éloignée de toute autre terre, la plus proche étant l’île d’Ascension à 700 milles/1125 kms au nord-ouest. C’est une île qui fascine les gens et beaucoup aimeraient y aller. Chose  onéreuse et compliquée actuellement pour qui vient d’Europe…
Sainte-Hélène est avec Ascension et Tristan da Cunha un des territoires britanniques d’outremer. 
Nous avons fait les formalités d’entrée le lendemain avec le chef de port, Steve, très chaleureux, et des douaniers et officiers de l’immigration bienveillants.
L’île, d’origine volcanique, est petite, 17km de long sur 11 de large. Ses côtes, de hautes et sévères falaises de lave dépourvues de toute végétation, sont difficiles d’accès et l’on est tout surpris de découvrir à l’intérieur à côté de zones quasi désertiques un paysage vallonné et très luxuriant. 
Les saint-héléniens, dits « les saints », sont au nombre de 4000  environ (un document parlent de plus de 6000…). Ils se composent de britanniques en poste sur l’île au service de sa majesté Elisabeth II, certains depuis très longtemps, et de locaux, au teint café au lait voire cuivré, descendants aux origines très mélangées, principalement malaises et africaines ( esclaves), chinoises et indiennes (ouvriers sous contrats pour remplacer les esclaves), boers ( prisonniers au début du XXème siècle) et européennes ( britannique, hollandaise, danoise, norvégienne et suédoise…). Tranquilles, souriants, accueillants, curieux de connaître les touristes qui débarquent sur leur île et de les renseigner ils participent largement au plaisir que l’on a à vivre à Sainte-Hélène. Tous vous disent bonjour quand ils vous croisent et quand ils conduisent lèvent quatre doigts du volant pour vous saluer. S’il y a bien une prison à Jamestown avec 15 cellules occupées paraît-il lorsque nous y étions, la criminalité et la délinquance sont extrêmement faibles sur l’île et sont imputables avant tout à l’abus d’alcool principalement le weekend.

Au nord-est de l’île, Jamestown est la capitale et la seule ville. Elle est installée tout le long d’une vallée qui monte vers les hauts, la James Valley. 

Vue de la mer...



Vue des hauteurs de la ville...



Actuellement tout visiteur arrive à Sainte-Hélène en bateau ( le RMS St Helena, le bateau ravitailleur, ou les voiliers qui font le tour du monde) et débarque, de façon d’autant plus acrobatique (voire dangereuse…) que la houle est forte, en s’accrochant à des cordes qui pendent d’un portique sur un petit quai de béton ( photo à venir). 


Là commence un long et large quai qui s’étire au bas de la falaise ( munie, comme à la Réunion, de filets métalliques pour retenir les roches qui se décrocheraient… Brrrr!). 






Il est bordé d’innombrables containers que le RMS Saint-Helena a apportés et qui sont ouverts et vidés les uns après les autres. Quand il repassera le RMS Saint-Helena les reprendra pour les remplir à nouveau à Cape Town et réapprovisionner l’île à son prochain passage. Il y a une rotation tous les 17 jours si nous avons bien compris. En plus du fret ce bateau emporte une centaine de  passagers dont certains restent sur l’île tandis que d’autres préfèrent aller visiter Ascension. Il transporte aussi dans un sens ou dans l’autre les saints qui travaillent sur l’île d’Ascension (25% des emplois ).






Après le quai commence la ville proprement dite. Le bas de Jamestown, c’est-à-dire la partie la plus proche de la mer, correspond à l’ancienne ville avec le Château du XVIIème ( dont il reste aussi les douves, le pont-levis et une porte d’accès ), la place d’armes (maintenant un parking) et quelques bâtiments toujours officiels (police, immigration …). 







Dans l'ancien château

Puis la ville s’étire le long d’une rue en pente qui se divise ensuite en deux rues dont la rue napoléon par où l'empereur serait passé. Il reste un bon nombre des maisons d’origine aux façades à l’architecture georgienne. Elles sont parfois peintes de couleur vive et donnent à cette petite ville un aspect guilleret. 














Il y a plusieurs églises de confessions différentes ( anglicane, baptiste, adventistes du 7ème jour, …), de nombreuses petites boutiques vendant un peu de tout dont de l’artisanat très décevant et quelques supermarchés de taille modeste mais bien approvisionnés ( sauf en fruits et légumes frais ce qui nécessite de les faire toutes et tous pour réussir à remplir votre panier), un marché très décevant lui aussi...


un office du tourisme efficace...



une banque et de nombreux endroits où se restaurer dont deux principaux, Ann’s Place joliment situé dans le jardin de la ville...



et the Consulate à l’agréable patio et à la décoration centrée sur Napoléon, avec une préférence pour ce dernier où nous avons nettement mieux mangé...







Dans l’un comme dans l’autre le prix pour la wifi est exorbitant ( 3.5 £ pour 1/2h!). 

Pour les français Sainte-Hélène est avant tout l’endroit où les anglais ont exilé Napoléon et où il est mort. Nous avons donc loué les services de Robert ( brochure trouvée à l’office du tourisme) pour visiter l 'île et aller sur ces lieux historiques. 




Robert ( ci-dessus) est un monsieur de près de 80 ans, toujours dynamique malgré un genou et une cheville qui le handicapent. Il connaît bien son île et a plein d’ histoires à raconter, « I’m going to do a story » comme il disait. Le problème est qu’il parlait beaucoup, vite et surtout avec l’accent local. Nous avons eu bien du mal à le comprendre et donc à faire pleinement profiter Armelle et Jean-Pierre de nos nouvelles connaissances! Nous avons compris le principal cependant et dans la maison de Napoléon il y avait une guide qui parlait très clairement et avec un très bel accent anglais ainsi que quelques panneaux explicatifs en français. 
Les saint-hélèniens ont su très tardivement qu’ils allaient devoir accueillir Napoléon sur leur île. Rien n’était donc prêt quand il est arrivé. Après avoir passé une nuit dans une maison du bas de la ville ( aujourd'hui disparue), infestée de cancrelats aux dires de Napoléon, il a été ensuite conduit au Pavillon des Briars, une toute petite maison,  appartenant à un privé, au milieu d’un beau paysage à quelques kilomètres de Jamestown. 
Il y est resté deux mois, le temps qu’on agrandisse et aménage à la hâte celle de Longwood où il est resté six ans, jusqu’à sa mort donc. Si les Briars n’était pas très éloignée de Jamestown, Longwood était au beau milieu de l’île, à au moins deux heures en calèche de la capitale. Napoléon serait bien resté aux Briars. Nous n’avons pas pu visiter cette première maison, en travaux, nous ne l’avons vue que de loin : ils étaient en train d’installer des chiens-assis dans la toiture. Les Briars comme Longwood et le site de la tombe de Napoléon sont des domaines français : il est étonnant qu’ils aient obtenu le droit de modifier l’aspect de la maison car ils n’existaient pas du temps de Napoléon. 



Longwood se situe sur un plateau élevé et assez dénudé, surtout à l’époque où on avait supprimé les arbres pour pouvoir mieux surveiller Napoléon. La maison consistait en sept ou huit très petites pièces, sombres, froides et humides. La première pièce était occupée presqu'entièrement par un billard (en réfection quand nous y sommes allés) mais Napoléon ne l’utilisait que pour y étaler ses cartes. Ensuite venait un petit salon, pièce dans laquelle il passa ses dernières semaines et où il mourut, ensuite venait la salle à manger, sa chambre et bureau, très spartiate, et sa salle de bain, la chambre de son valet puis encore une ou deux pièces pour le service. Les repas, pris dans la salle à manger, étaient vite expédiés car la cheminée qui fonctionnait tout le temps vu l’humidité, enfumait rapidement la pièce. Derrière cette partie de la maison il y avait quelques petits bâtiments pour son personnel. La maison est entourée d’un jardin assez grand dont Napoléon aurait dessiné les plans lui-même et où il se détendait en jardinant ou plutôt en faisant jardiner ses proches, pas ravis, le maréchal Bertrand entre autres… Personnellement je n’ai pas trouvé ce jardin bien joli  avec ses petites allées qui se coupaient à angle droit pour délimiter des carrés.  Surtout nous l’avons trouvé mal entretenu.
Napoléon ne s’y plaisait pas et le gouverneur de l’île, Sir Hudson Lowe, avec lequel il s’est tout de suite et définitivement heurté, n’a rien fait pour rendre son séjour sur l’île, moins pénible. 
Il passait son temps à lire, à écrire ses mémoires, à jardiner, à se promener, le plus souvent à cheval, à rendre visite à quelques personnes de l’île. Mais surtout il s’ennuyait à mourir!
On s’est demandé si Napoléon n’avait pas été empoisonné et lui-même le pensait mais l’arsenic qu’on a effectivement retrouvé dans ses cheveux proviendrait de celui que l’on utilisait pour tuer les rats qui infestait cette maison et qui se mêlait à l’humidité et à la fumée ambiantes. Il serait mort d’un cancer de l’estomac comme beaucoup de membres de sa famille. 
Il était interdit de prendre des photos à l’intérieur de la maison et il n’y avait pas de boutique où acheter de livres sur Napoléon à Sainte-Hélène. J’espérais y trouver le livre de Jean-Paul Kaufman, La Chambre Noire de Longwood. 

Entrée des visiteurs
Autre entrée donnant sur l'arrière des bâtiments : l'entrée de Napoléon?











La tombe de Napoléon se trouve dans la Sane Valley, un bel endroit, très verdoyant que Napoléon aimait beaucoup et où il allait très souvent se promener. Il avait demandé à être enterré là si jamais - mais il n’y croyait pas - on ne ramenait pas son corps en France. Sa volonté a été respectée par Sir Hudson Lowe, le gouverneur qui pourtant, de son vivant,  ne lui a jamais fait de cadeau!  Il a fallu attendre 1840 pour que son coprs puisse être ramené aux Invalides à Paris.












C’est pour éviter que les partisans de Napoléon puissent organiser une évasion depuis ces îles que les anglais se sont intéressés à Ascension et à Tristan da Cunha.

En plus des sites napoléoniens, Robert nous a fait découvrir une grande partie du centre de l’île et nous a, chemin faisant,  renseigné sur l’histoire et l’économie du pays, passées et présentes.
Napoléon n’a pas été le seul personnage à être exilé dans cette île : un chef rebelle zulu, Dinizulu, des princes du Bahrain et 6000 prisonniers boers y ont aussi été déportés pendant plusieurs années, ces derniers entre 1900 et 1902 à Deadwood Plain. Robert nous a montré les endroits où ils étaient détenus.
D’autres personnages très connus sont venus sur l’île - pas comme prisonniers cette fois - entre autres Edmund Halley en 1673 et Charles Darwin en 1836, le premier pour établir une carte des étoiles de l’hémisphère sud, le deuxième pour faire un état des plantes indigènes de l’île.
Enfin il faut se souvenir que le Royaume Uni a été le premier pays d’Europe à abolir l’esclavage et à lutter contre ce fléau en particulier dans l’Atlantique Sud, zone jusque là très peu surveillée. Parmi ceux qui ont habité Sainte-Hélène il ne faut donc pas oublier tous les esclaves africains ( plus de 15 000 entre 1840 et 1849) que les britanniques y ont déposés et dont ils se sont occupés après qu’ils aient pourchassé les bateaux négriers, les aient arrêtés et libéré leur triste cargaison. En très mauvais état un tiers de ces esclaves sont morts sur l’île, certains ont été employés par les habitants et, bien traités, ont décidé de rester, d’autres ont été amenés en Jamaïque, en Guyane britannique, à Trinidad et au Cap. 

Robert nous a aussi montré les diverses églises de l’île dont, dans les hauts du côté de Longwood,  la cathédrale St Paul...



Plantation House, la résidence du gouverneur construite par la Compagnie des Indes Orientales...




le fort de High Knoll...




construit en 1798 où la population pouvait se réfugier en cas d’invasion de même que ce qui était le fort et la batterie de la Ladder Hill (=la Colline de l’Echelle) maintenant transformés en divers bureaux et habitations privées. Ils auraient l’intention de lui donner une vocation touristique.

François était le seul de nous quatre à avoir envie de se payer les 699 marches de cet escalier qui autrefois était équipé de wagonnets tirés par des ânes pour monter le fumier des chevaux de l’armée jusqu’aux jardins en haut de la colline. Finalement il a abandonné! Nous y sommes allés avec notre guide. La vue sur la ville y est très belle...







Robert nous a baladés dans la partie vallonnée et verte de l’île : on se serait cru en Normandie ou vers chez nous dans le Brionnais et le Charolais où les pâtures sont d’un vert cru et où broutent des troupeaux de bovins! C’est d’ailleurs là qu’ils ont installé le golf de l’île : même avec cette précaution certaines zones étaient bien pelées! 










L’eau est effectivement le gros problème de l’île. Sainte-Hélène reçoit peu de pluie. Soit elle tombe sous forme de brouillard ou alors de façon très parcimonieuse soit elle s’abat en trombe créant des inondations mémorables ( 1873 par exemple). C’est pourquoi Jamestown est traversée sur toute sa longueur par le Run, un canal bétonné assez large et profond qui emmène rapidement les eaux pluviales jusqu’à la mer. Il y a plusieurs réservoirs d’eau dans les hauts mais il pourrait y en avoir bien plus.

Le Run en deux endroits de la ville...







C'est dans ces hauts que fut cultivé une espèce d'aloès dont on tirait le chanvre. Cette culture amena à l'époque une certaine richesse à l'île. Il n'est plus cultivé depuis bien longtemps, néanmoins il couvre toujours une grande surface des hauts.





Un projet «  le Millenium Forest Project » démarré en 2000 a pour but de recréer la forêt qui couvrait toute la partie est de Sainte-Hélène, forêt entièrement détruite par l’abattage des arbres par l’homme ( bois de construction, de chauffage etc…) et par l’introduction de chèvres et autre bétail. Les arbres choisis, des essences locales robustes, les « gumwood trees » ne nécessitent, elles, pas beaucoup d’eau. C’est bien sûr un travail sur le long terme mais cela semble bien parti et les saints en sont très fiers. 

Enfin Robert nous a parlé de l’aéroport qui est en train d’être construit dans le nord de l’île et qui va complètement changer la vie des saints et l’ambiance de l’île. On le voit très bien depuis la Millenium Forest...




Beaucoup en sont désolés. L’idée est d’assurer une autonomie financière à l’île en développant le tourisme en provenance de l’Afrique du Sud et de la Namibie principalement. Les travaux sont déjà bien avancés : on voit très bien la piste et la tour de contrôle. L’aéroport devrait entrer en fonction début 2016, certains précisent février. Le problème selon nous est que l’île n’est actuellement pas prête à recevoir beaucoup de touristes ( hôtels, restaurants, cafés en nombre insuffisant, qualité de la restauration pas à la hauteur de ce pourraient attendre ces touristes, tables des coins pique-nique en très mauvais état, un artisanat comme je le disais plus haut très décevant…). Certes il est prévu un hôtel 5 étoiles à Deadwood Plain ( là où se trouvait le camp de prisonniers boers) mais est-ce vraiment ce dont l’île a besoin? Ste Hélène a beaucoup à offrir côté randonnées. Je ne suis pas sûre que ce soit la clientèle des hôtels 5 étoiles!

A Sainte-Hélène il y a aussi la plongée, la pêche, la découverte d’une flore et d’une faune (oiseaux principalement) uniques au monde… 
Il faut maintenant que l’île se mette au travail pour accueillir tous ces nouveaux visiteurs! Heureusement dans un premier temps il n’y aura qu’un vol par semaine, le samedi.


Cet aéroport représente quand même une promesse d’emplois pour les habitants et peut-être qu’ainsi les jeunes pourront rester dans l’île et ne pas partir qui à Ascension, qui aux Malouines, qui à l’étranger pour trouver du travail. 

Il est certain que Sainte-Hélène, sans parler de tout ce qui touche à Napoléon, a un grand potentiel touristique avec les randonnées, potentiel qu’elle a déjà bien développé : les randonnées sont nombreuses, les guides sont très bien faits, les chemins sont bien entretenus et l’office du tourisme fait bien son travail. Toutes les promenades sont  des « letter-box walks » : quand vous avez atteint le but de la randonnée vous trouvez une petite boîte qui contient un stylo et carnet où vous inscrire ainsi qu’un tampon à appliquer sur votre carnet de randonnée. Rien d'extraordinaire mais c'est très sympa!
Nous avons fait la randonnée la plus proche de Jamestown, la randonnée de la " Heartshaped Waterfall" ( = la Cascade en Forme de Coeur), une jolie balade qui mène à une cascade qui doit être impressionnante quand l'eau jaillit du haut de la falaise après qu’il ait bien plu. C'est tout près du Pavillon des Briars et Napoléon aimait beaucoup cette partie de l'île et cette balade en particulier.   Le jour où nous y sommes allés il s’en échappait un mince filet que le vent vaporisait en un petit rideau de gouttelettes! Mais peu importait, nous avions besoin d’exercice avant de repartir pour une semaine de navigation! 




On ne voit ici que la moitié du coeur!
L'arbre qui produit les "baies roses" qui parfument délicieusement nos plats de viande. Ce n'est pas un poivrier.

Une des nombreuses plantes endémiques de l'île



Nous avons ainsi passé six jours très intéressants et agréables à Sainte-Hélène et le 14 mai nous repartions pour l’île de l’Ascension, une autre île volcanique au nord-ouest de Sainte -Hélène. Six jours de navigation dont quatre avec très peu de vent mais nous avions décidé de ne pas appuyer au moteur. Nous n’avons fait que 4.88 noeuds de moyenne mais qu’importait : il faisait beau et rien ne nous pressait. De fait la traversée a été particulièrement agréable! 






Nous avons même pris un beau poisson le jour de notre arrivée, un petit thon " à nageoires jaunes" ( "yellow fin tuna", d'après notre guide) , espèce qui se prend le plus ici et que nous avons mangé en compagnie d'Armelle et Jean-Pierre (ALIBI) et de Lucia et Franz (DALWHINNIE)... Il s'en prend ici de très gros, de deux, trois mètres!







ASCENSION

Nous sommes arrivés devant Georgetown le 20 mai en milieu de journée. 
Là, pas de corps-mort, nous avons mouillé. En revanche les autorités portuaires nous ont demandé de ne pas utiliser nos annexes pour ne pas gêner les manoeuvres du cargo qui venait d’arriver du Royaume-Uni. Même système qu’à Sainte-Hélène pour accéder au quai : des cordes auxquelles on s’accroche comme on peut quand la vague est à la bonne hauteur!
Notre première impression a été assez négative : une île apparemment désertique, parsemée de radars de tous types et d’antennes aux formes bizarroïdes...










une ville qui n’en est pas une, juste quelques constructions coloniales en pierre...





et quelques autres bâtiments plus récents et plutôt moches disséminés ça et là dont les habitations bon marché des travailleurs venus de Sainte-Hélène;  et surtout pour ainsi dire pas âme qui vive!… 
Puis nous avons découvert un petit supermarché plutôt bien achalandé, même en fruits et légumes frais, une poste, un bar, un hôtel restaurant et une jolie petite église fraîchement repeinte...





Nous avons aussi découvert un « conservation centre », c’est-à-dire un centre de protection de la nature.  
Ascension n’a pas de population autochtone, les habitants, 1700 environ, civils et militaires compris, sont tous de passage pour des séjours correspondants à leurs contrats de deux ou trois ans.  Elle dépend administrativement de Sainte-Hélène et la politique des britanniques est de ne pas laisser de population quelle qu’elle soit s’installer pour qu’elle ne puisse revendiquer des droits sur Ascension. 
Ascension est entrée dans l’Histoire grâce à Napoléon : les britanniques y envoyèrent un détachement de la Royal Navy quand il fut envoyé à Sainte-Hélène pour que les français ne puissent s’en servir comme base pour le délivrer. Ensuite l’île devient un important centre de télécommunications avec l’installation de câbles télégraphiques sous-marins entre le Royaume-Uni et la ville du Cap. Enfin lors de la Deuxième Guerre mondiale elle servit de gigantesque porte-avions entre l’Amérique et l’Europe après la construction par les Américains d’un aéroport et le débarquement de 4000 soldats. En 1957 les Américains y construisirent un centre d’essais de missiles et en 1963 la BBC y installa des antennes pour diffuser sa voix dans le monde entier. En 1967 la NASA s’y installa et y possède encore une station de suivi de satellites et un centre de recherche sur l’espace extérieur. D’où le nombre impressionnant de radars et antennes qui hérissent la surface de l’île!
La piste de la base aérienne, utilisée conjointement pas les américains et les britanniques, a été agrandie pour pouvoir accueillir les atterrissages forcés de navettes spatiales.  
C’est donc une île très particulière pas vraiment tournée vers le tourisme.

Et pourtant elle possède quelques attraits touristiques indéniables. Nous avons bien discuté avec une jeune employée du centre de protection de la nature et nous avons grâce à elle organisé les visites que nous voulions faire sur l’île : tout d’abord et avant tout, voir des « green turtles » (je ne sais quel est exactement l’équivalent en français) pondre leurs oeufs et  assister à l’éclosion de ces oeufs. Ensuite nous voulions aller faire une randonnée sur la «  green mountain » … à croire que tout est vert sur cette île!
Il faut savoir qu’ Ascension est l’île où viennent se reproduire 90% des tortues vertes (?) au monde et en particulier sur la plage devant laquelle nous étions mouillés, Long Beach. Elles sont nées sur cette île et pour beaucoup sur cette plage. De là elles partent vivre au Brésil où il y a de belles prairies marines. Tous les quatre ans environ, à partir du moment où elles sont à même de procréer, elles reviennent sur l’île et la plage où elles sont nées pour y pondre leurs oeufs. Depuis le Brésil, à plus de 2200 kms! Elles restent plusieurs mois sur Ascension, en gros de janvier à mai, y sont fécondées par plusieurs tortues mâles et pondent six à sept fois une centaine d’oeufs de pères différents. Pendant cette période elles ne mangent pas car il n’y a pas d’herbes dans les fonds marins entourant l’île. Quand elles ont pondu tous leurs oeufs elles repartent, épuisées et affamées, pour cette longue traversée jusqu'au Brésil où elles vont pouvoir enfin remanger.
Tous les matins on pouvait voir une quarantaine de traces de tortues  venant de la mer et retournant à la mer, ce qui voulait dire qu'une vingtaine de tortues étaient venues pendant la nuit. Et nous étions à la fin de la saison!









Ce sont de grosses tortues à la carapace brune plutôt que verte et assez lisse qui peuvent vivre jusqu’à 60 - 80 ans. Celles que nous avons vues faisaient environ un mètre trente de long sur près d’un mètre de large et pesaient entre 80 et 100 kilos! Quand nous sommes arrivés, avec notre guide du centre, la première avait déjà creusé un grand trou et pondait. Nous étions équipés de lampes rouges pour ne pas la gêner et nous l’avons regardée pendant une bonne heure peiner pour déposer et recouvrir ses oeufs de sable ( semblable à des balles de tennis de table en un peu plus gros) puis nous l’avons laissée tranquille. 
Deux jours plus tard, avant le lever du soleil nous sommes retournés sur la plage, seuls cette fois, et avons vu une autre tortue quitter et avec beaucoup de peine retourner à la mer. Cela lui a pris longtemps, elles s’arrêtait souvent pour reprendre des forces : c’était très émouvant.










Ce même matin nous avons vu quelques tortues nées pendant la nuit et qui n’avaient toujours pas rejoint la mer. Il faut dire que  la plage, labourée par les nombreuses tortues qui viennent faire des trous pour y pondre leurs oeufs, ressemblait à un champ de bataille de la première guerre mondiale avec ses innombrables trous d’obus! De ce fait il fallait beaucoup d’énergie aux petites tortues ( 7cms de long sur 5 de large) pour escalader les trous dans lesquels elles tombaient immanquablement! Un certain nombre meurent d’épuisement ou encore ne trouvent jamais le chemin de la mer et s'égarent en ville! 








Petite tortue morte, de couleur gris beige

Une des tortues qui avait survécu jusqu'à notre arrivée, de couleur gris vert foncé 

Celles que nous avons trouvées seraient mortes, d’épuisement, de dessèchement ou attrapées par les oiseaux marins, si nous le leur avions pas donné un coup de main en leur faisant franchir la partie la plus difficile de la plage. Quand nous les avons reposées pour qu’elle fassent les derniers mètres seules - très important si l’on veut qu’elles retrouvent leur plage à l’âge adulte - nous les avons vu reprendre vie comme par miracle et atteindre enfin la mer! Un spectacle incroyable de beauté!








Nous avons eu aussi la chance de voir sortir du sable tout un nid de tortues, du moins celles du dessus, les autres n’étaient apparemment pas prêtes à éclore. Elles, étaient bien vigoureuses et après quelques hésitations et une aide de notre part ont pris la bonne direction, tombant dans un trou, remontant pour tomber dans le suivant et ainsi de suite. On avait l’impression que plus elle approchaient de l’eau plus elles se précipitaient.








Le jour venait de se lever et déjà planaient au dessus de nous des frégates, des goélands et des fous prêts à foncer sur ces proies faciles. 



Malheur en effet aux tortues qui naissent de jour : elles n’ont aucune chance de leur échapper! Nous les avons donc protégées jusqu’à leur arrivée à la mer. Là nous ne pouvions plus rien pour elles et d’autres prédateurs les attendaient, en particulier les balistes noirs qui pullulent dans cette baie et qui sautent sur tout ce qui se présente, vos mollets par exemple s’il vous prend l’idée d’aller gratter votre coque! Sur 1000 petites tortues seule 1 parviendrait à l’âge adulte! Ces tortues étaient une nouvelle expérience pour nous et nous espérons qu’il nous sera donné de la refaire, à Trinidad peut-être.

Quant à la "Green Mountain", qui couvre quasiment tout le sud-est de l’île,  c’est la création de deux hommes, Charles DARWIN, le botaniste bien connu, et John HOOKER, directeur des Kew Botanical Gardens (GB) au milieu du XIXème siècle. A l’origine le sommet de cette montagne était avant tout couvert de fougères. Grâce à ces deux botanistes la montagne a été, au XIXème siècle, l’objet d’une expérience unique : elle a été transformée en une "cloud Forest  ou "rain forest" (forêt humide) par la préservation et protection des plantes endémiques et par la plantation massive de plantes exotiques. 




Nous y avons fait une randonnée, une des plus faciles - Armelle et moi avons du mal à faire des marches longues et/ou avec dénivelé - mais une des plus belles aussi. C’est la randonnée de Elliot’s Pass qui fait le tour du haut de la montagne par un chemin plat la plupart du temps. 
En y montant nous avons rencontré de gros crabes terrestres jaune orangé à la gueule patibulaire. Dix jours auparavant, comme tous les ans, ces crabes étaient descendus en masse de la montagne pour se reproduire sur les plages, un spectacle étonnant que nous venions de manquer. Il y en avait quand même partout sur les abords de la route et nous avons dû faire attention pour ne pas en écraser d'autant plus qu'ils sont protégés! 










En faisant la randonnée de Elliot Pass on a des vues superbes sur tous les secteurs de l’île. 








En regardant bien on voit nos deux voiliers devant la plage





Comme à Sainte-Hélène on peut tamponner son courrier quand on atteint le point extrême de la randonnée.






La végétation nous a beaucoup rappelé celle de la Réunion avec les bambous, les bananiers, le faux gingembre, les caféiers, les aloès, les goyaviers, les innombrables sortes de fougères, les capillaires… en plus d’espèces locales et uniques à l’île souvent en danger de disparition.









Quelques fleurs vues sur la montagne...











La Montagne Verte, qui tient son nom du fait qu’elle est en contraste par sa couleur avec le reste de l’île, a joué et continue de jouer un grand rôle dans la vie de l’île car c’est d’elle que provient toute l’alimentation en eau de l’île. Depuis le début du XIXème siècle des canalisations puis des réservoirs y ont été installés comme celui-ci qui longe Elliot’s Pass.





Pour faire cette balade nous avions loué une voiture. Nous en avons profité pour terminer la journée sur une très jolie plage, la Comfortless Beach. Nous nous y sommes baigné dans une eau turquoise à une température des plus agréables mais nous n’y sommes pas restés longtemps car des balistes noirs et des sergents-majors s’attaquaient à nos mollets à moins de continuellement agiter les jambes! Les mêmes poissons voraces qui pullulent aux abords du quai de débarquement et qui se jetaient sur tout ce que nous leur jetions depuis le bateau! 





Au loin nos voiliers...





Sur les hauteurs de la plage avaient été mis en quarantaine les soldats atteints de la fièvre jaune d’un bateau, le Bonetta. Un bon nombre y sont morts et l’on voit encore le touchant cimetière où ils ont été enterrés.





Nous n’avons pas regretté notre escale à Ascension, île vraiment unique en son genre. Nous garderons en particulier le souvenir des tortues étonnantes  qui la fréquente.

Le dimanche 24 mai, soit quatre jours après notre arrivée, nous repartions pour la dernière étape de la traversée de l’Atlantique Sud : Ascension-Brésil. Encore une fois cette traversée s’est de façon générale bien passée. Comme pour la traversée de l’Océan Indien ALIBI et YOVO sont restés en vue l’un de l’autre toute la traversée. Etonnant et agréable! 
Deux petits incidents cependant l’ont pimentée. Tout d’abord notre frigo s’est mis à ne plus fonctionner normalement ( il tournait tout le temps! Pas terrible avec nos batteries faiblardes!) : François s’est rendu compte que c’était le ventilateur qui était fautif. Nous en avions un d’avance et François a effectué le changement en un tour de main! Ensuite, - et là c’était plus grave - lorsque, le quatrième soir, François a voulu prendre des ris avant la nuit, il nous a été impossible de faire descendre la grand-voile. Elle restait bloquée en haut. Déjà en partant de Sainte-Hélène François s’était étonné que la partie de la drisse où elle s’attache au haut de la voile ait été très abîmée. C’était lié! Il faudra que nous voyons pourquoi en arrivant au Brésil. Nous avions bien besoin de notre GV complète aussi François a -t-il réussi le lendemain, avec le winch et un bout passé dans les oreilles de chien, à la forcer à descendre jusqu’à un peu au-dessus des premières barres de flèche  - c’était déjà un peu moins haut! - et là il est monté au mât en serrant des dents car il y avait de la houle et que bien qu’il ait beaucoup progressé il souffre toujours un peu du vertige! Là il a détaché la drisse de GV, l’a arrimée à un bout ( elle servira de messager quand on la changera) et l’a remplacée par la balancine ( le bout qui tient la bôme quand nous ne naviguons pas). Encore une fois j’étais très admirative et aussi soulagée car nous n’aurions guère avancé et dans l’inconfort avec juste le génois. Bravo François!

Quatre jours de bon vent, deux jours avec un vent mollissant et les deux derniers jours avec à nouveau un vent correct, huit jours donc et nous sommes arrivés à Cabedelo puis quelques milles plus loin, en suivant le cours d'une rivière bordée de villages, à Jacaré où se trouve une marina tenue par deux français. Nous y sommes parvenus au moment de l’étal de marée ce qui nous a permis de rentrer tout de suite dans la marina.  Nous y sommes restés deux semaines, le temps de faire connaissance des lieux et de préparer le bateau pour une absence de près de six mois. Le dix juin nous prenions l'avion pour retrouver la France, nos enfants, petits-enfants et autres parents et nos amis.





Pour notre prochain article je vous proposerai un retour en arrière : il concernera l'Afrique du Sud. En fait il y aura sûrement plusieurs articles tant il y a à en dire!

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