jeudi 12 avril 2018

LA JAMAÏQUE


LA JAMAÏQUE
( du 25 février au 16 mars 2018)




Partis de Bonaire le dimanche 25 février à 8h du matin nous avions bon espoir de faire une belle traversée car nous allions dans le sens du vent, la mer était déjà bien calmée après deux semaines de temps fort et les sites météo annonçaient 15 noeuds de vent. 
Malheureusement le vent a beaucoup manqué au départ et surtout les dernières 24 heures où, las de n’avancer qu’à 1 noeud et demi ( environ 2,7km/h), nous avons fini par céder et mis le moteur. Ce fut donc une traversée très confortable mais bien longue!  Tout le long de cette traversée nous avons rencontré des « sargasses », ces algues roussâtres qui, pour nous, ont surtout eu pour effet de nous obliger à vérifier l’hameçon de notre ligne de traine tous les sans-cesse!








Nous sommes arrivés à la Jamaïque le jeudi 28 février un peu avant la tombée de la nuit. C’était une bonne chose car le chenal bien balisé d’après la carte ne l’était en fait pas! Seul la première balise verte était en place ( elle fonctionne aussi de nuit). Toutes les autres ont disparu. Au mieux il en reste le poteau sur lequel elles étaient fixées! Jacqueline et Marcel de MOWGLI savent mieux que d’autres le danger qu’elle peuvent représenter! Néanmoins en suivant sur la carte Navionics la ligne marquant l’accès au mouillage, large, on peut arriver à bon port, même de nuit. L’endroit est bien protégé et beau : mini plages de sable blanc, falaises rouges, végétation  verte foisonnante… 





Tout au fond sur la droite quelques bâtiments où sont installés les Coast Guards et la police. 






Un vieux jamaïcain, David, qui est en train de se construire tout près de là une maison en bois, nous a dit qu’il y a encore cinquante ans cette baie était un port très actif par où se faisait l’exportation du sucre et des bananes. Il n’en reste plus rien maintenant sinon quelques vestiges qui font effectivement penser à une ancienne usine à sucre. Le lieu est très calme, en fait quasi désert, et sûr vu la proximité des autorités. Nous n’avons vu aucun bateau local s’approcher du mouillage. 

Les formalités auront pris 48h! : Patricia du Ministère de la Santé  est venue dès le vendredi matin mais l’immigration ne s’est occupée de nous que le vendredi soir et les douanes que le samedi après-midi!! Il faut préciser qu’ils viennent soit de Kingston soit de Port Antonio, donc à plusieurs heures de là, pour s’occuper des quelques rares navigateurs à venir là. Heureusement nous avons eu le droit d’aller à terre dès après le passage de Patricia. Cela nous a permis d’aller en minibus - toute une expérience : nous étions 20 dans ce bus prévu pour 12! - à Morant Bay où François a pu consulter un dentiste qui lui a enlevé les deux dents branlantes qui ne maintenaient plus son bridge! Nous avons pu aussi obtenir des dollars jamaïcains et une carte SIM qui marchait très bien à Morant Bay et plus du tout sur le bateau! 
Le mouillage le Port Morant, en plus d’être joli et sûr, a l’avantage d’être gratuit. De là on peut aller à Kingston et aux John Crow et Blue Mountains mais il faut reconnaître que c’est, à chaque fois, toute une expédition!  Il faut marcher vingt minutes jusqu’à un arrêt de bus, attendre qu’il y en ait un ( parfois une demi-heure). A Morant Bay, à vingt minutes de là, on prend à la gare routière un bus pour Kingston  qui ne part que quand il est plein et bien plein, ce qui peut prendre du temps! Le trajet jusqu’à Kingston dure une heure et quart. Ainsi, si vous partez du mouillage à 7h vous pouvez espérer être à Kingston à 9h30. Nous avons fait deux voyages à Kingston : il y plus confortable et plus rapide mais certainement pas moins cher, moins d’ 1.50€ pour aller à Morant Bay et de 3.50 € pour aller à Kingston!
Dès nos premières balades autour du mouillage, dans les transports, dans les villes et villages, nous avons été frappés par la gentillesse des jamaïcains qui vous invitent à venir discuter avec eux, se proposent pour vous aider dès qu’ils voient que vous avez un problème, etc… Les rastas sont particulièrement charmants.
Port Morant a peut-être été un port actif mais c’est maintenant juste une gros village en zone rurale, installé le long de la route qui mène à Morant Bay, des maisons parfois en dur mais mal faites ( souvent par les propriétaires eux-mêmes, qu’ils s’y connaissent ou pas), souvent pas terminées, les parpaings et les fers à béton apparents ou, le plus souvent, de pauvres cahutes de bois ou bois et tôle.  Quelques boutiques, là aussi en dur ou en planches plus ou moins jointives. Comme souvent dans ces localités les supermarchés, en fait des minimarchés, sont installés dans d’anciens containers. 







La maison que se faisait construire Lisa, une jeune femme avec qui nous nous sommes liés d'amitié

Celle que se construisait au rythme d'une ou deux planches par jour David, un monsieur que nous avons souvent rencontré aussi. C'est lui qui construisait la maison en moellons de Lisa, ci-dessus


Certains jamaïcains sont bien habillés, quelques-uns, souvent de vieux rastas, sont vêtus de loques. Les gens ont en général un petit lopin de terre dans lequel ils ont des bananiers, des fruits à pain et des manguiers et font pousser du manioc, des légumes, des herbes et épices diverses. Les plus riches ont une voiture ( dans quel état parfois!), un bon nombre de jeunes ont des motos mais beaucoup se déplacent à vélo ou à pied et bien sûr dans les fameux minibus et bus heureusement vraiment pas cher. 




La vie y est très calme. On voit les femmes s’occuper des enfants, de la cuisine, de la lessive, discuter sur les vérandas… Les hommes travaillent dans les jardins, font du charbon de bois, construisent leur maison, entretiennent ou réparent leur voiture… Ils ont tous la radio et la télévision. Le dimanche les enfants et les femmes, habillés de blanc, vont à la messe, au temple ou dans leur secte, au choix. Il n’y a pas de musulmans en Jamaïque. 






Il y a aussi les matchs de foot, de baseball, le sport national… Nous, les navigateurs que ces gens voyaient passer sur la route quasiment tous les jours, étions l’attraction! 

A Kingston, en particulier dans le centre ville, la vie est beaucoup plus trépidante et bruyante. Il y a beaucoup de circulation et une foule de gens sur les trottoirs. A La Parade, près du parc William Grant, là où l’on prend le bus pour retourner à Morant Bay, entre les charrettes à bras, les colporteurs de toutes sortes et les gens qui attendent le bus, on ne sait où passer.

Nous sommes allés à Kingston une première fois pour aller acheter une carte de tourisme pour Cuba au Consulat de Cuba  et pour aller au Musée Bob Marley à vingt minutes à pied. Il est installé dans la maison-même de Bob Marley, une maison assez grande mais sans prétention. Il y vivait et y avait ses studios d’enregistrement. Nous avons fait la visite avec un guide qui connaissait par coeur toutes ses chansons et en interprétait des passages de temps en temps rejoint par un rasta qui faisait la visite comme nous. Une visite intéressante pour nous qui aimions bien ses chansons mais connaissions peu l’homme et sa vie. C’était un rasta, avant tout tourné vers les autres, vers les pauvres, quelqu’un de bien, mort jeune, à 36 ans, des suites d’un mélanome ( il « aurait « refusé de se faire amputer d’un orteil voire du pied quand on pouvait encore faire quelque chose. A vérifier…).

Devant la maison...



Sur les murs de la propriété...







En sortant nous sommes passés à l’Alliance Française pour aller discuter avec les gens qui la dirigeaient. Nous avons rencontré une dame, madame Bauer, qui en est la présidente. Les locaux sont très modestes ( ils devaient déménager dans les semaines qui venaient ) et la bibliothèque peu fournie mais ils attendaient l’arrivée d’un directeur dont madame Bauer espérait beaucoup. Le français est peu étudié en Jamaïque et ils n’ont que 50 élèves, des adultes, et beaucoup de difficultés pour trouver des enseignants. 

Nous sommes allés à Kingston une deuxième fois pour aller aux Blue Mountains. 
Le trajet jusqu'aux Blue Mountains est bien sûr venu s’ajouter à celui de Port Morant à Kingston! A Kingston nous avons pris un bus jusqu’à Papine ( à quelques kms au nord de Kingston) et de là la seule solution était de prendre un taxi privé ( très nettement plus cher que les transports en commun : 13€ pour faire environ 6 kms) pour aller jusqu’au gîte où nous avions réservé deux nuitées.  Le trajet, tout en montée parfois très raide, le long du flanc de la montagne, surtout quand il a voulu prendre un raccourci, était impressionnant et vraiment beau.
Notre gîte s’appelait le Mount Edge Guesthouse. Ce gîte avait une situation exceptionnelle et les chambres étaient construites sur des pilotis sur le flanc de la montagne au dessus d’un à-pic. 








Les deux salles du restaurant, l’une ouverte l’autre couverte, sont bien mais les chambres sont faites avec du matériel de récupération, pas ce que nous attendions de ce gîte vanté par Booking.com. La nôtre, très petite avait un lit en pente et surtout pas de rideaux, juste de légers voilages qui n’assuraient aucune intimité. Un chemin passait juste derrière notre chambre et les autres résidents avaitnt une vue plongeante sur notre lit! Nous sommes arrivés vers 11 heures, il faisait beau, nous y avons déjeuné en admirant la vue et les nombreux colibris et sucriers qui venaient boire l’eau sucrée des petits distributeurs disséminés dans l’hôtel. 






Ensuite nous sommes descendus visiter une plantation de café quelques kilomètres plus bas, le Craighton Estate. 80% de leur production, comme celle des autres plantations de Jamaïque, part à Kobe, au Japon. A entendre le guide il n’y aurait pas différentes qualités de café robusta au contraire du café arabica pour lequel la nature des sols, l’altitude, le degré d’humidité et  la durée ensoleillement  donnent des qualités différentes. Bien sûr celui des Blue Mountains est un des meilleurs! Nous avons fait une balade dans la plantation - malheureusement les baies venaient d’être cueillies et les arbustes commençaient à peine à former de nouveaux bourgeons  - puis on nous a servi du café de la plantation, effectivement très moelleux et parfumé,  avec un morceau de gâteau pendant que le guide nous donnaient des renseignements sur la culture du café. Nous étions une trentaine de visiteurs, dominés par un groupe de taïwanais qui ont monopolisé le temps du guide donc le nôtre en nous forçant à attendre à chaque fois la traduction de ce qui était dit. Ceci dit nous avons trouvé la visite très intéressante, un peu chère quand même, 20€!








En arrière-plan la ville de Kingston




Le lendemain nous somme montés avec notre taxi privé  de Papine ( pas d’autre 
possibilité) jusqu’au Hollywell National Park. Le temps était couvert mais nous avons pu faire une petite randonnée, le Oatley Mountain Trail, où, surprise, nous avons retrouvé Francine et Philippe de FREE VIKINGS, rencontré dans le mouillage de Port Morant mais parti quelques jours plus tôt pour Port Antonio sur la côte nord de la Jamaïque. Nous avons fait la balade ensemble. 

Le centre d'accueil est très joli et bien fleuri.













Le temps s’était dégradé et peu après avoir commencé à redescendre vers notre guesthouse, à pied par la route, il s’est mis à pleuvoir des cordes!  Aucun endroit pour s’abriter! Nous avions emporté les grandes capes que nous avions achetées pour aller aux chutes d’Iguaçu (Brésil) et bien nous en a pris : seuls nos bas de pantalons et nos chaussures étaient trempés. Un peu avant d’arriver au gîte nous avons pris au Bubble Shop ( pourquoi ce nom???) François une bière et moi un chocolat chaud qui nous ont bien réconfortés.  Une bépicerie-bar bien typique! 






Arrivés à l’hôtel le toit de notre chambre et de notre salle d’eau avait fui! Par chance ni notre iPad ni nos autres effets n’ont été mouillés! La direction nous a attribué une autre chambre, pire que la précédente : plancher troué, rien pour poser ou accrocher ses vêtements, douche sans pommeau et installée juste devant le lavabo… mais au toit étanche! Un gîte dont, selon nous, les prestations ne méritent pas le prix demandé ( 50€ environ). Ceci dit la direction a été très correcte et ne nous a pas fait payer la deuxième nuit. Et la vue depuis le gîte était unique!
De façon générale les Blue Mountains nous ont beaucoup fait penser à la Réunion tant du point de vue de la géologie ( cette région est aussi d’origine volcanique) que de la végétation ( fougères de toutes sortes dont les fougères arborescentes, rhododendrons, fuchsias, plantes épiphytes, bambous, faux gingembre… ).








Nous sommes redescendus à Kingston et comme il nous restait une demi-journée avant de reprendre le bus pour Morant Bay nous sommes allés visiter la Galerie Nationale où nous avons découvert les peintres jamaïcains des siècles passés au XIXème siècle. Un beau musée, relativement moderne et où les oeuvres sont bien mises en valeur. Chose assez rare : on peut prendre des photos. On a beaucoup aimé les oeuvres les plus récentes, celles de George RODNEY, Barrington WATSON, Osmond WATSON, Eugene HYDE et Norman YOUNG pour n’en citer que quelques-uns. 






Portrait de Norman MANLEY

Une peinture d’un artiste anonyme du XVII ème siècle nous a aussi beaucoup touchés.



Toute une section était consacrée à une anglo-jamaïcaine, peintre puis sculptrice de grand talent, Lady Edna MANLEY  dont le mari, Sir Norman MANLEY, homme politique et héros national, a beaucoup oeuvré pour l’indépendance de la Jamaïque.


Cette statue , très agrandie et en bronze, se trouve sur lr front de mer pas très loin du musée


Nous n’avons pas beaucoup apprécié la peinture, un peu plus les sculptures,  de Mallica REYNOLDS dit « KAPO », le chef très charismatique d’une secte religieuse, une sorte de gourou qui a joué un rôle majeur dans la définition de l’art jamaïcain, en particulier dans la peinture intuitive de la seconde moitié du XXème siècle. Je ne fais  là que répéter ce que j’ai lu! 




Cette grande sculpture occupe une grande partie du hall d'entrée. Elle s'appelle "la Conversation". J'aime bien.



Avant de quitter le mouillage de Port Morant nous sommes allés nous balader à pied jusqu’à la pointe où nous avions vu, en arrivant, un grand moulin à canne à sucre. Rien de bien extraordinaire ni de bien différent des maisons autour du mouillage. Autrefois il y avait là une grande usine à sucre dont il ne reste que ce moulin et sur la hauteur, du côté de l’antenne, une maison de maître en très mauvais état que nous avions découverte lors d’une autre balade.



Minuscules haricots en train de sécher sur une tôle

Nous avons dit au revoir aux garde-côtes, à David dont nous avons déjà parlé et à Lisa, une jeune femme que nous avions rencontrée très souvent et avec qui nous nous étions lié d’amitié et nous sommes partis en direction de Port Antonio sur la côte nord-est.

Le phare qui est la pointe sud-est de la Jamaïque






Peu avant d’arriver nous avons vu, sur la côte, ce qui ressemble à un château de côte de fée. Nous allions apprendre que c’est un hôtel de luxe connu ici sous le nom de « the Castle »!  Tout près de lui mais de l’autre côté de la route et non visible de la mer se trouve « The Palace »!  Tout un programme!





A Port Antonio, deux possibilités, un mouillage gratuit à l’est et une marina à l’ouest. Nous sommes allés dans la marina, très jolie dans son écrin de verdure et de fleurs et très pratique pour faire les formalités de sortie et les dernières courses ( important avant d’arriver à Cayo Largo, Cuba, où nous savions que nous ne trouverions que très peu de produits frais! ).






Nous avons vu ce joli héron à dos vert quasiment tous les jours sur les bords de la marina

Nous ne sommes pas restés longtemps à Port Antonio, juste un peu plus de trois jours. Suffisamment pour nous balader dans la petite ville très animée à deux pas de la marina, pour faire le tour de l’îlot, situé devant la marina, qui a appartenu à Errol Flynn et sur laquelle il faisait paraît-il des bringues inimaginables.







Nous sommes aussi allés voir les très belles Reach Falls avec Ray, un jamaïcain parlant bien anglais, particulièrement débrouillard et très introduit dans le milieu des navigateurs.  La route pour y parvenir, assez longue ( une heure en voiture) longe la côte vers l’est et offre de beaux paysages marins.






Les cascades elles-mêmes valent le déplacement. La moitié inférieure appartient à la communauté du village de Reach et c’est un villageois, un copain de Ray, dont j'ai malheureusement oublié le nom, qui les fait visiter. Avec lui nous avons remonté les différents bassins jusqu’à une corde jaune tendue dans les arbres en travers du torrent. Les touristes qui font la visite avec les gens du gouvernement ne les voient que depuis le haut. C’est beaucoup moins bien!  Est-ce moins cher? Comme nous n’étions que nous deux dans la voiture nous en avons eu au total pour près de 90€!  Mais cela en valait la peine : c’était vraiment magnifique et il a fait très beau. 














le copain de Ray




Retour par la route et arrêt chez notre guide, l'ami de Ray, qui a une petite boutique d’artisanat et bar un peu plus bas. Il décore  lui-même très joliment des calebasses et nous lui en avons acheté une.








De la Jamaïque nous n'avons en fait visité que l'est de l'île mais le peu que nous en avons vu nous a beaucoup plu. Au départ nous ne pensions pas nous y arrêter mais ce sont Britta et Jens de LILLI qui nous ont convaincus de le faire et ils ont bien fait. Nous nous y sommes senti très bien et en sécurité.

Le 16 mars nous reprenions la mer pour Cuba, plus exactement l’île de Cayo Largo, très à l’ouest, à 60 milles ( 100 kms) environ à l’est de l’île de la Juventud. Pour quoi pas Santiago de Cuba, beaucoup plus proche, comme presque tous les autres navigateurs? Nous avions calculé qu’en allant à Cayo Largo d’une seule traite par la mer nous gagnions beaucoup de temps et que nous n’aurions plus alors qu’à faire un seul trajet, le trajet Ouest-Est, pas le plus facile mais nous pourrions prendre notre temps, choisir nos créneaux météo et serions finalement gagnants. Nous pensions avoir trouvé une bonne fenêtre météo pour y aller et sommes donc partis le vendredi 16 mars. 




Suite dans notre prochain article sur Cuba.




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